Le Parti communiste du Canada condamne l’assassinat de Jovenel Moïse, président de facto d’Haïti, survenu dans la nuit du 6 au 7 juillet dernier par un commando de 28 mercenaires (26 de nationalité colombienne et 2 États-Uniens). Au-delà de l’intrigue politique à savoir qui a subventionné cet attentat, nous nous inquiétons du fait que cette opération ne fait que renforcer l’oligarchie réactionnaire locale en plus de justifier une nouvelle occupation militaire de la part des puissances impérialistes (notamment des pays membres du Core Group dont le Canada fait partie).
Cet assassinat survient dans un contexte d’escalade de violences, mais surtout alors que les masses populaires haïtiennes étaient en pleine mobilisation contre Moïse et en réclament le départ, son mandat étant constitutionnellement terminé depuis le 7 février dernier. Il convient d’ajouter que depuis l’hiver 2020, Moïse gouvernait par décrets, le parlement (acquis à l’opposition au parti présidentiel Tèt Kalé) ayant été dissous après que les mandats sont arrivés à terme et que les élections législatives n’aient pu être organisées faute de conditions favorables notamment à cause de la pandémie.
De plus, Moïse et ses acolytes tentaient de passer en force un référendum constitutionnel qui, selon plusieurs, ferait retourner le pays au temps du duvaliérisme notamment en concentrant encore plus le pouvoir dans les mains du Président et en remplaçant le poste de Premier ministre par un Vice-Président. Moïse justifiait cette manœuvre par la prétention que le système actuel (pourtant hérité de la Constitution de 1987, elle-même fruit des mobilisations populaires qui ont eu raison de Duvalier) était à l’origine du chaos politique dans lequel le pays est plongé.
Or, la crise politique, sociale et économique à laquelle sont confrontés les Haïtien-nes est le fruit d’interventions militaires, de coups d’État, de pillage des ressources naturelles et humaines, de néocolonialisme et d’une classe dirigeante qui obéit au doigt et à l’oeil à l’impérialisme occidental, en particulier canadien, états-unien et français. Qu’un président puisse être assassiné par une poignée d’hommes en est un exemple probant en plus de dévoiler le caractère fantoche de l’État haïtien.
Même si la situation actuelle reste nébuleuse, une chose est sûre : en aucun cas, l’assassinat de Jovenel Moïse ne pave la voie à une issue populaire aux différentes crises en Haïti.
Au contraire, parmi les pressentis pour lui succéder, on compte entre autres, Nicolas Duvalier (fils de Baby Doc) et l’ancien macoute Michel Martelly. S’il est un camp qui sort renforcé de cet assassinat, c’est celui des plus réactionnaires et de l’impérialisme, tel qu’attesté par la possibilité réelle d’un déploiement prochain de troupes états-uniennes dans cette nation caribéenne.
Communistes, nous réitérons notre solidarité envers le peuple haïtien. Nous condamnons également la responsabilité canadienne manifeste dans la crise sociale, économique et politique dans laquelle est plongé le peuple Haïtien et ce, depuis plusieurs décennies, notamment en prenant activement part au coup d’État contre le Président démocratiquement élu Jean-Bertrand Aristide en 2004. Conscients que la première étape pour une sortie populaire à cette crise passe par la restauration de la souveraineté du pays – si chèrement acquise en 1804 – tant sur le plan politique qu’économique, nous exigeons le retrait immédiat du Canada du Core Group et la fin de toute ingérence dans les affaires internes du pays. Nous nous engageons enfin à nous mobiliser contre toute tentative d’intervention militaire canadienne potentielle suivant cet attentat.