Pour une véritable reconnaissance de l’État palestinien
Le Parti communiste du Canada, réuni en Comité central, accueille avec réserve l’annonce de la reconnaissance de l’État de Palestine par le Premier Ministre, Mark Carney. Prononcé le 30 juillet dernier, cet « engagement » suit ceux du Président français Macron, puis du Premier Ministre britannique Starmer non seulement sur le plan chronologique, mais aussi en termes de contenu.
Dans les trois cas, la reconnaissance de l’État palestinien est, à degrés divers, conditionnelle à la « démilitarisation » de l’État palestinien, la tenue d’élections en 2026 dans lesquelles le Hamas ne pourra jouer aucun rôle et des profondes réformes en matière de gouvernance démocratique (lire ici néolibérales). Autrement dit, il s’agit d’une reconnaissance d’un État sans lui garantir son droit à l’autodétermination, donc sans souveraineté.
Effectivement, ni la France, ni la Grande-Bretagne, ni le Canada ne font référence aux frontières de ce putatif État, pas plus qu’ils ne garantissent que Jérusalem-Est serait sa capitale. À plus forte raison, ils brillent par leur mutisme sur la question du droit au retour des réfugiés de 1948. Sans ces garanties, cette reconnaissance sert essentiellement de monnaie d’échange diplomatique.
Pendant ce temps, le Canada comme ses acolytes de triade ressassent continuellement le « droit d’Israël à se défendre », une ineptie en matière de droit international puisque ce levier juridique ne peut être invoqué par une puissance occupante contre la population qu’elle occupe. Ce faisant, ils se rendent complice du génocide en cours autant que de la brutale colonisation accélérée en Cisjordanie.
Israël quant à lui continue d’occuper le Sud-Liban, le Golan, bombarde la sous-région (Iran, Yémen, etc.) et abrite l’arme nucléaire. S’il est un pays à démilitariser, à intimer de se conformer au droit international, c’est bien lui. S’il est une faction politique qui doit être privée de toute influence dans la vie politique nationale, c’est celle de Netanyahu et de ses alliés, des sionistes qui n’ont pour autre but avoué que le génocide des Palestiniens.
L’heure n’est pourtant pas à jouer les Cassandre. Malgré toutes ces contradictions, on ne peut occulter le fait que cet engagement représente une victoire des mouvements démocratiques, populaires et syndical. Ainsi, il n’en revient qu’à nous pour transformer l’essai et utiliser cette reconnaissance de l’État palestinien sans illusions, mais comme levier pour nous assurer que, bien plus qu’une monnaie d’échange, elle ouvre de nouvelles perspectives de lutte pour une véritable reconnaissance de l’État de Palestine en garantissant entre autres :
- La création d’un État palestinien viable dans les frontières d’avant juin 1967 avec Jérusalem-Est pour capitale, solution consensuelle acceptée par l’ensemble des mouvements de résistance palestiniens à travers la Déclaration de Beijing de 2024;
- Le démantèlement des colonies situées sur les territoires occupés et le droit au retour des réfugiés de 1948;
- La libération immédiate des prisonniers politiques enfermés en Israël;
- La démilitarisation d’Israël, à commencer par le démantèlement de son programme nucléaire, puis l’abolition des lois discriminatoires à l’égard des Palestiniens.
Pour y parvenir, le Parti communiste du Canada appelle, dans l’immédiat, à :
- Un cessez-le-feu immédiat de la part d’Israël et la fin immédiate du génocide en cours;
- Imposer un embargo bidirectionnel sur le trafic d’armes entre les deux pays;
- Renforcer le mouvement de Boycott, désinvestissement et sanctions contre Israël, incluant le boycott académique et institutionnel;
- Rompre les relations diplomatiques et commerciales avec Israël, incluant la fermeture du Bureau du Québec à Tel-Aviv;
- L’abolition du recrutement pour l’Armée israélienne au Canada;
- Contrer activement la définition opérationnelle de l’antisémitisme produite par l’Alliance internationale pour la mémoire de l’Holocauste qui sert les intérêts de ceux qui cherchent à criminaliser la solidarité avec la Palestine.
Plus généralement, nous avons pour devoir de contribuer au renforcement et à l’élargissement du mouvement de solidarité avec la Palestine. Si la lutte contre l’impérialisme et l’internationalisme prolétarien constituent des impératifs cruciaux pour les communistes et que ces enjeux sont au coeur de la lutte de libération nationale que mène le peuple palestinien, il reste que celle-ci ne peut triompher que moyennant l’appui actif que lui porteront les forces partisanes de la paix, progressistes, démocrates et toutes les gens de bonne volonté.
Alors que la vaste majorité du monde appuie la Palestine, l’heure n’est pas à la passivité ni aux boniments, mais à l’action décisive de sorte que le gouvernement Carney fasse usage de la “souveraineté canadienne” pour isoler les forces promotrices du génocide en cours et, par le truchement d’une véritable reconnaissance de l’État palestinien, contribue à barrer la route à la guerre au Moyen-Orient.
Comité central, Parti communiste du Canada